Hier ennemis jurés, opposants irréconciliables, aujourd’hui des potes qui se font des bises sur la joue et des tapes dans le dos. Le président de la Fédération algérienne de football (FAF), Mohamed Raouraoua et son homologue égyptien Samir Zaher, se sont réconciliés mercredi 15 décembre lors d’une rencontre organisée à Doha, au Qatar. Oubliées donc les excuses publiques que Zaher devait au peuple algérien. Le président de la FAF a accepté de renier sa parole, de s'asseoir sur l'honneur de son pays, de troquer sa dignité contre un soutien de l’Egypte pour sa candidature à un poste au sein du comité exécutif de la FIFA.
Tout ça pour ça ! Ce rabibochage intervient une année après que les deux hommes se sont déclarés la guerre au lendemain du caillassage au Caire du bus de l’équipe algérienne de football qui devait rencontrer l'équipe égyptienne dans un match capital comptant pour la qualification à la Coupe du monde 2010.
Depuis ces incidents du Caire qui ont provoqué une onde de choc et une vague d’indignation en Algérie, le patron de la FAF avait conditionné la normalisation de ses relations avec M. Zaher par des excuses publiques que ce dernier devait à l’Algérie. « Je ne pardonnerai à Samir Zaher que s’il présente des excuses publiques, pas à moi, mais à l’Algérie», avait déclaré M. Raouraoua le 12 mars 2010. Ces excuses n’ayant pas été exprimées publiquement, le président de la FAF a refusé d’enterrer la hache de guerre avec les Egyptiens.
Mais voila ! Dans l’univers du football où les intérêts personnels de certains individus peuvent s’accommoder de quelques reniements à la morale, à l’honneur et à la dignité, Mohamed Raouraoua a fini par renoncer à ses exigences en scellant la paix avec son ancien ennemi juré. En renonçant à ce qu’il avait réclamé à maintes reprises. Certes, il y a temps pour la guerre et un autre pour la paix. Certes encore, il y a un temps pour la réconciliation mais encore faut-il que celle-ci ne s'obtienne pas au prix d'un reniement de la parole donnée. Le président de la FAF avait pris à témoin les Algériens qu'aucune réconciliation avec Samir Zaher n'est possible avant que celui-ci - en sa qualité de président de la Fédération égyptienne de football (FEF) et non à titre personnel-, ne fasse des excuses publiques à l'Algérie. Et bien Raouraoua a failli à sa parole.
A l’hôtel Sheraton de Doha, ce mercredi 15 décembre, les retrouvailles entre les deux hommes auront été grandioses. Ravalée la haine, remisées les insultes aux martyrs, effacé le sang des Algériens qui a giclé au Caire, le drapeau national violé, l’ambassade d’Algérie attaquée…Oubliées les excuses, du passé on fait table rase. Deux bises, deux tapes sur le dos, voilà nos deux ennemis jurés redevenus, des amis, mieux, des frères.
« En tant qu’Algérien, je ne pardonne pas à ceux qui ont insulté nos martyrs, notre drapeau ainsi que notre ambassadeur en Egypte qui, pourtant, avait déployé beaucoup d’efforts pour apaiser les esprits », affirme Raouraoua lors de la conférence de presse qui a sanctifié cette réconciliation. Avant de demander aux journalistes présents de « contribuer dans l’apaisement des esprits, car, s’il y a eu des tensions à l’excès, c’est en partie à cause d’une minorité de journalistes qui ont envenimé les choses en trompant l’opinion publique ».
Ah bon?! Ce sont donc les journalistes qui ont envenimé les choses et trompé l'opinion? Si de part et d'autre il y a eu des dérapages, des excès, le président de la FAF n'est pas exempt de reproches. M. Raouraoua a-t-il oublié qu'il était le premier à avoir insulté Zaher peu de temps après le caillassage du bus algérien le 12 novembre 2009 ? « Regardez avec quoi ils nous ont frappé, regardez avec quoi, dit-il au journaliste qui le filmait. Inaal Tez ammou.. Inaal Tez ammou...». Une expression qu'on pourrait traduire comme ceci : « que Dieu maudisse le sexe de sa mère... »
Et que dit Zaher à l'hotêl Sheraton? Samir Zahir fait table rase du passé sans pour autant présenter ces fameuses excuses publiques tant exigées. « Raouraoua et moi sommes des amis et même des frères, depuis de longues années, déclare doctement Zaher Je me suis entretenu avec lui et nous avons surtout parlé de l’avenir. Nous n’avons pas évoqué le passé. Nous sommes désormais disposés à l’accueillir à tout instant. Justement, la Fédération égyptienne de football tiendra une réunion les 24 et 25 décembre et nous invitons Mohamed Raouraoua à être notre invité en la circonstance ».
Mais pourquoi donc le président de la FAF a-t-il renoncé à ses exigences ? Pourquoi a-t-il accepté de se rabibocher avec celui-là même dont il disait ne plus vouloir serrer la main tant qu’il n’aura pas présenté ses excuses au peuple algérien ? La réponse est simple : Mohamed Raouraoua, 65 ans, a besoin du soutien de l’Egypte, donc de celui de Zaher, pour sa candidature au comité exécutif de la FIFA (Fédération internationale de football association) dont l’élection se déroulera le 23 février 2010 à khartoum, au Soudan. L'honneur de l'Algérie vaut bien un siège à la FIFA pour Raouraoua
Mohamed Raouraoua et Samir Zaher : L'armistice est signé, les mots restent
Raouraoua dans le Buteur le 14 novembre 2009
« De quelles relations fraternelles avec l’Egypte me parle-t-on, alors que les responsables de ce pays ont tout fait pour nous humilier. Ils sont allés jusqu’à nous enfermer avec l’arbitre et les commissaires dans le vestiaire. Ils ont utilisé tous les stratagèmes pour nous faire perdre le match. Le commissaire au match a tout rédigé dans son rapport. Ils nous ont agressé à notre arrivée. Le résultat final est logique à mon sens eu égard à tout ce que nous avons vécu ici depuis notre arrivée. C’est pour cela que j’ai refusé de m’asseoir aux côtés de Zaher. Il n’y a plus d’amitié qui tienne lorsque l’honneur de l’Algérie est terni de la sorte.»
Raouraoua au Buteur 18 novembre 2009 :
« J’ai été, en effet, convié hier à un dîner, mais j’ai préféré décliner cette invitation poliment non pas par maque d’égards à mes amis soudanais auxquels je voue le plus grand respect, mais parce que je ne voulais pas saluer Zaher ni m’attabler avec lui. Il ne mérite pas que je lui serre la main, après tout ce qui s’est passé au Caire.»
Mohamed Raouraoua à Liberté 18 novembre 2009 :
« Aucune réconciliation n’est possible avec Samir Zaher. Je l’ai fait comprendre à tout le monde y compris au président d’El-Merrich qui nous a effectivement invités lundi soir à un dîner. Aujourd’hui encore, j’ai refusé de serrer la main à Samir Zaher en marge de la réception que nous a offerte le président soudanais, Omar El-Bachir. Je fais savoir que le jour du match au Caire, j’ai refusé de serrer la main à Samir Zaher et rester à ses côtés dans la tribune officielle. J’ai préféré rester avec mon équipe. Désolé, mais je ne peux pas oublier ce qu’on a fait au Caire à mon équipe et à mes supporters. Mais je veux ajouter encore une chose.»
Zaher 13 décembre 2009 sur une chaîne de télévision égyptienne :
« Les hautes autorités de notre pays vont prendre la décision d'interdire tout séjour de Raouraoua en terre égyptienne. Il ne remettra plus les pieds en Egypte. C'est lui l'instigateur des incidents survenus à Khartoum.»
Zaher 12 mars 2010 sur la chaîne égyptienne Dream 2 :
« il y a des tentatives entreprises par certains sportifs arabes pour permettre à l’Egypte et l’Algérie de se réconcilier. Mais je tiens à souligner que nous avons des droits sur l’Algérie comme ils ont prétendu en avoir sur nous ».
Zaher au journal Filgoal 14 mars 2010 :
« Il n’est pas question que nous nous excusions auprès de l’Algérie. Le président de la Confédération asiatique de football, Mohammed Bin Hammam, joue les médiateurs mais le président de la Fédération algérienne, Mohammed Raouraoua, insiste pour que nous nous excusions. Nous ne nous excuserons que si Raouraoua s’excuse aussi pour ce qu’il s’est passé au Soudan avant le match de barrage. »
Raouraoua au Buteur 21 mars 2010 :
«Je ne pardonnerai à Samir Zaher que s’il présente des excuses publiques, pas à moi, mais à l’Algérie ».
Raouraoua à Liberté 22 mars 2010 :
« Au-delà du verdict de la Fifa qui est attendu pour les prochains jours dans l’affaire du caillassage du bus de l’équipe nationale au Caire, nous estimons que les Égyptiens doivent nous présenter des excuses officielles pour les graves préjudices causés à l’équipe nationale. C’est pour nous une condition majeure pour la normalisation des relations entre les deux Fédérations ».
Zaher dans le Buteur 26 mars 2010 :
« Comment puis-je m’excuser pour des attaques isolées, alors que les Algériens ont bien programmé les leurs contre nous au Soudan ? Si Mohamed Raouraoua attend que je présente des excuses, c’est plutôt lui qui devrait le faire pour tout ce qui s’est passé à Oum Dourmane.»
Vidéo amateur dans laquelle Raouraoua profère des insultes contre Samir Zaher
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire