mercredi 29 décembre 2010

L’arbitrage international place le gouvernement algérien dans une situation complexe


Naguib Sawiris reprend la main dans le dossier Orascom Télécom Algérie. Mardi, le milliardaire égyptien a fait part de son intention d’aller vers l’arbitrage international dans le dossier Djezzy.

Cette option paraissait inéluctable depuis plusieurs mois. Jusqu’à cette semaine, aucune issue négociée ne semblait envisageable. Le gouvernement algérien a refusé de discuter avec les acteurs concernés –Orascom Telecom, MTN, VimpelCom– et a rejeté toutes les offres de médiation.

Mais Naguib Sawiris, prudent, s’est donné le temps nécessaire pour agir. Avec 1,2 milliard de dollars, fruit de la vente de Tunisiana à QTel, l’homme d’affaires égyptien dispose d’un sursis de près de deux ans auprès de ses banquiers. Le temps nécessaire pour l’aboutissement de l’arbitrage international avec l’Algérie si aucun accord amiable n’est trouvé d’ici là avec le gouvernement algérien.

Mais « Naguib Sawiris est connu pour ne pas être raisonnable quand il est en position de force », explique un connaisseur des milieux financiers internationaux. Depuis quelques semaines, l’homme d’affaires égyptien le répète sans cesse : il refuse de discuter sur une autre base que celle de l’offre formulée par le sud-africain MTN. Selon M. Sawiris, cette offre valorisait Djezzy à 7,8 milliards de dollars. On est loin des 2 ou 3 milliards de dollars que le gouvernement algérien souhaiterait payer pour s’emparer de Djezzy. Et on ignore quelle est la marge de négociation des deux parties. En Algérie, le dossier semble être davantage politique qu’économique. Pour Naguib Sawiris, la tentation de prendre une revanche sur le gouvernement algérien qui a failli détruire son empire pourrait aussi être présente.

Incertitude sur l’avenir de Djezzy

Les deux parties semblent toutefois oublier qu’au cœur de l’enjeu, il y a Djezzy, premier groupe privé du pays, avec un taux de rentabilité exceptionnel, des salariés et une maitrise technologique certaine. Depuis près d’un an, l’opérateur est malmené par le fisc et la Banque d’Algérie. Le premier lui réclame près de 800 millions de dollars. La Banque d’Algérie a décidé de l’interdire de toute opération de commerce extérieur. Les conséquences d’une telle décision pourraient se voir dans les prochains jours. Privé d’équipements, Djezzy risque de voir son réseau s’effondrer.

Mais paradoxalement, le sort de Djezzy n’est plus un souci pour Naguib Sawiris. Pour lui, le plus important sera le prix qu’il obtiendra du tribunal d’arbitrage. « Le tribunal ne décidera pas sur la base des performances de Djezzy dans un an ou deux mais probablement sur la valeur de Djezzy avant le début de la crise avec le gouvernement algérien », explique le même expert.

Résultat : la procédure d’arbitrage met le gouvernement algérien dans une situation complexe. S’il décide de maintenir la pression fiscale et bancaire sur Djezzy, il risque de donner des arguments à Naguib Sawiris et d’hériter au final d’une entreprise moribonde, détruisant presque instantanément la valeur qu’il vient d’acquérir. S’il décide de se préparer sérieusement à la reprise de Djezzy, il n’aura d’autre choix que de lever l’interdiction d’opérations bancaires avec l’étranger et réduire la pression fiscale et administrative. Mais cette option n’est pas sans risque pour lui. Orascom Telecom Holding (OTH) va récolter de nouveaux dividendes et les performances opérationnelles dans les prochains mois pourraient peser sur l’arbitrage, surtout s’ils sont bons.

Le gouvernement va devoir trouver le bon dosage pour permettre à Djezzy de survivre à la longue procédure d’arbitrage sans pour autant donner des arguments à son adversaire, Naguib Sawiris. Un exercice difficile qui demande beaucoup d’expertise et de sang-froid.

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