dimanche 5 décembre 2010

L’appel d’offres lancé par le gouvernement s’annonce déjà comme un échec


Un appel d’offres mal conçu –le gouvernement était à la recherche d’une banque d’affaires ou d’un cabinet conseil, deux métiers complémentaires pour ce type d’opération–, un gouvernement hésitant sur ses intentions et sa stratégie, un Etat de moins en moins crédible parmi les milieux d’affaires internationaux. Résultat : le 24 novembre dernier, on a assisté à une ouverture de plis quasi-humiliante pour l’Algérie. Deux choses illustrent cette humiliation : l’absence des grandes banques d’affaires internationales de la liste des candidats et la présence d’un petit cabinet tunisien parmi les dix soumissionnaires pour cette opération estimée à 8 milliards de dollars, soit 25% du PIB de la Tunisie en 2009.

Or, depuis quelques années, les opérations financières à 8 milliards de dollars sont rares dans le monde, surtout dans le secteur des télécommunications où les actifs mis en vente sont de plus en plus rares. L’affaire Djezzy présente également un autre aspect intéressant: il s’agit d’une nationalisation quasi-forcée, avec la perspective d’une bataille devant un tribunal d’arbitrage international. Les candidats capables d’accompagner le gouvernement algérien se devaient donc d'avoir de solides atouts.

Mais curieusement aucune grande banque d’affaires internationale n’a répondu à l’appel d’offres algérien. Sur la liste des 10 postulants, Goldman Sachs, Morgan Stanley, JP Morgan, Barclays, Lazard, UBS… sont absentes de la liste. Il y a certes HSBC et Rothschild. Mais la première est une grande banque de détail avec une activité de banques d’affaires et non une véritable banque d’affaires parmi les plus importantes. Et la seconde est « une petite boutique comparée aux grandes banques d’affaires », explique un expert en fusions-acquisitions.

Pour cet expert, l’absence des grandes banques d’affaires pourrait s’expliquer par « le manque de crédibilité de l’Etat algérien surtout sur le dossier Djezzy. En Tunisie, le dossier Tunisiana a été réglé en 40 jours sans bruits. En Algérie, l’affaire dure depuis plus d’un an, avec de fréquents changements de stratégie », explique-t-il. « Il est clair que les grandes banques d’affaires s’intéressent à ce type de dossiers. Mais elles ne peuvent engager des équipes sur un projet dont l’aboutissement n’est pas garanti », ajoute-t-il. L’été dernier, le gouvernement avait en effet annulé un premier contrat d’évaluation de Djezzy avec un cabinet privé algérien.

Dans son choix d’un partenaire qui va l’accompagner dans le processus d’acquisition de Djezzy, le gouvernement sera également confronté à un autre souci majeur : sur les dix candidats, quatre ont déjà travaillé avec Orascom Telecom Holding (OTH) ou Vimpelcom. Ainsi HSCB a travaillé à la fois avec OTH à plusieurs reprises et Vimpelcom. Rothschild a déjà conseillé OTH et Telenor, un des principaux actionnaires de Vimpelcom. Les deux autres cabinets qui ont déjà travaillé avec l’un ou l’autre des groupes sont Renaissance Capital (GB) et Global Investment House (Koweït). Or, l’appel d’offres exclut de fait les banques et cabinets qui ont déjà eu des relations avec OTH et son nouveau propriétaire Vimpelcom.

Le gouvernement algérien a le choix entre six cabinets de taille modeste : RSM (Tunisie), Swicorp (Arabie Saoudite), Grant Thornton (France), Goetz Partners (Allemagne), Shearman and Sterling-LLP (France). Une liste qui sonne comme un échec de l’appel d’offres.

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