lundi 23 mai 2011

Algérie, les opérateurs de téléphonie face au renouveau de l’ARPT

Depuis le début de l’année, les offres promotionnelles des opérateurs de téléphonie mobile se font rares, au grand dam des millions de consommateurs à l’affut de bonus et autres « gratuités ». A l’origine de cette trêve sur le marché des télécoms, la décision « N°2/SP/PC/ARPT/11 » du gendarme ARPT qui annonce une ferme reprise en main du marché. Mais ce n’est là qu’un des traits du retour en force de l’agence de régulation qui a commencé par un ménage « intra muros ».

Le temps des promotions à profusion est fini où la guerre des offres faisait rage entre les opérateurs de téléphonie pour acquérir de nouveaux clients ou contrer les nouveautés des concurrents. Depuis le 12 janvier 2011, une circulaire de l’Autorité de régulation de la Poste et des Télécommunications impose à Mobilis, Djezzy et Nedjma de se limiter à une seule offre promotionnelle par mois avec un intervalle d’au moins 45 jours entre deux promotions. Une véritable douche froide pour les stratèges Marketing des trois opérateurs qui voient leurs marges de manœuvres extrêmement rétrécies. Et un coup de frein au dynamisme du marché où les trois protagonistes se partagent un alléchant gâteau de 32 millions de consommateurs. Pour l’ARPT, la décision vise avant tout à mettre de l’ordre sur le marché : « Nous avons constaté ces dernières années une multitude d’offres promotionnelles souvent lancées en un laps de temps très court. Cela a crée une grande confusion chez les consommateurs qui se sont plaints à plusieurs reprises pour dénoncer en particulier la manière avec laquelle ces offres étaient communiquées » explique M. Fayçal Medjahed, responsable de la communication au sein de l’Autorité de régulation. En d’autres termes, l’ARPT agit dans le souci « de la protection du consommateur en lui donnant le temps d’assimiler le contenu des offres » promues à renfort de campagnes publicitaires massives sur les différents médias.

Encadrer la publicité des opérateurs

La décision de l’Autorité s’intéresse également à la manière de communiquer des opérateurs de téléphonie mobile, à l’origine de nombreuses plaintes de clients parvenues à l’ARPT. Et l’article 10 est on ne peut plus explicite : « Les opérateurs sont tenus d’assurer à l’adresse de leurs clients une information claire, exhaustive, sincère et non équivoque sur les tarifs et les conditions de toute offre promotionnelle… ». Devant l’absence d’une association indépendante de protection du consommateur, l’ARPT a cru bon assumer ce rôle en s’octroyant un droit de regard – et d’action - sur le contenu des messages publicitaires diffusés dans les médias qui, souvent, prêtent à équivoque. Ils (les opérateurs NDLR) doivent (…) s’interdire toute publicité de nature à induire en erreur les consommateurs notamment par l’indication d’avantages ou attributs qui ne seraient pas effectivement accordés aux bénéficiaires, au titre du produit objet de la promotion », est-il en outre ainsi stipulé dans la décision. L’Autorité que dirige Mme.Fatiha Derdouri semble avoir tiré les leçons – tardivement certes - des dérapages constatés ces dernières années, quand la guéguerre entre opérateurs mobiles sur le terrain de la communication a gagné en intensité et semé la confusion dans les esprits des millions d’utilisateurs. Même la publicité insinuant des avantages comparatifs entre opérateurs ne semble plus tolérée par l’ARPT. Dernier épisode en date, l’opérateur Djezzy a été contraint d’ajouter un détail dans le visuel de sa campagne « Control 900 » car la maquette initiale pouvait donner lecture à une position privilégiée par rapport aux offres de Mobilis et Nedjma.

Les opérateurs coopèrent

Autre nouveauté dans les rapports de force ARPT-opérateurs mobiles : ces derniers « coopèrent pleinement » et appliquent à la lettre les décisions émises par le gendarme des télécoms. Une attitude qui tranche nettement avec le passé quand des opérateurs ignoraient royalement les décisions de l’ARPT malgré les risques de sanctions encourus. Un expert connaisseur du marché algérien des télécoms, qui a requis l’anonymat, avance deux explications : « Avant de faire le ménage sur le marché, la présidente de l’ARPT a commencé par son propre Conseil en changeant 4 des 7 membres qui le composent », nous confie notre interlocuteur. Une ferme reprise du contrôle de l’agence de régulation opérée durant l’été 2010. Un changement qui intervient aussi dans le sillage de la « mise au pas » de l’opérateur Orascom Telecom Algérie, ce qui a conduit au bras de fer que l’on connait. La deuxième explication relève de l’implication directe des services de sécurité dans le secteur : « La carte sim a été décrétée comme équipement sensible qui a un impact sur la sécurité nationale surtout qu’elle est souvent utilisée pour commettre des attentats ». Les opérateurs sont donc soumis à un strict contrôle de la part des services de sécurité, en particulier dans le volet lié à l’identification des utilisateurs. Des réunions périodiques sont régulièrement organisées tous les 3 mois entre l’ARPT, des représentants de la DGSN et de la gendarmerie nationale et les directeurs généraux des 3 opérateurs mobiles pour faire le point. Ces derniers savent qu’ils sont surveillés comme le lait sur le feu. Et qu’ils ont tout intérêt à exécuter les décisions qui leurs parviennent.

Source : Maghreb Émergent au 23/05/2011

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