vendredi 4 mars 2011

Tunisie - Orange aurait monnayé l’obtention de sa licence 3G


L’opérateur de téléphonie français aurait acquis sa licence tunisienne 3G non pas en payant son prix à l’Etat tunisien mais en investissant 95 millions d’euros dans Divona, dirigée par Marwan Mabrouk, gendre du président Ben Ali. Cette société, qui s’est vue attribuer la précieuse licence par décret présidentiel en juillet 2009, deviendra «Orange Tunisie», une entreprise prospère, avec un portefeuille de 800.000 clients.

L’acquisition par Orange de la troisième licence tunisienne 3G n’a pas été de toute transparence à en croire une enquête publiée le 3 mars 2011 par le site d’information Owni. Pour l’obtenir, l’opérateur français aurait investi 95 millions d’euros dans Divona, devenue plus tard Orange Tunisie (800 mille clients) mais qui n’était alors qu’une petite société dirigée par Marwan Mabrouk et son épouse, Cyrine Ben Ali, fille du président déchu. Pour Owni, c’est là une explication crédible de ce que le prix officiel de la licence, 130 millions d’euros, soit très bas en comparaison avec celui payé quelques mois plus tôt par le concurrent Tunisiana, pour une licence 2G (280 millions d’euros).

Les 95 millions d’euros injectés dans Divona, souligne le site français, documents à l’appui, ont permis à Orange d’acquérir 49% de son capital, les 51% restants étant détenus par le gendre de l’ancien chef d’Etat tunisien. C’est suite à cette opération que la licence 3G a été attribuée à cette société de droit tunisien par décret présidentiel, publié dans le Journal Officiel de la République tunisienne (le décret 2009-2270, du 31 juillet 2009).

Violation de la convention de Mérida contre la corruption

Les documents rendus publics par Owni remettent en cause la version officielle sur les affaires d’Orange en Tunisie. Selon cette version, l’opérateur français a investi dans ce pays 260 millions d’euros, dont la moitié pour la mise en place de son réseau de téléphonie et l’autre moitié pour l’acquisition de sa licence 3G. Le journal affirme qu’en plus des 95 millions d’euros d’investissements dans le capital de Divona, il lui a versé 25 millions d’euros sous forme de « survaleur ». « En langage financier, explique-t-il, c’est un “goodwill”, car l’acheteur sait qu’il paye plus que le prix estimé, soit parce qu’il profite des droits de propriété intellectuelle de la structure dont il fait l’acquisition, soit parce qu’il pense tirer un bénéfice d’exploitation qui justifie ce sacrifice. »

La révélation des dessous de « l’affaire Divona » est une énième confirmation du pouvoir économique tentaculaire de la famille Ben Ali. Surtout, elle renseigne sur les moyens obscurs auxquels recouraient certains milieux d’affaires européens pour s’implanter en Tunisie. Owni rappelle opportunément qu’en soutenant l’entreprise de Marwan Mabrouk et de son épouse dans le but de conquérir le marché tunisien, Orange pourrait avoir violé la convention onusienne de Mérida sur la lutte contre corruption, en vigueur depuis 2005.

Pou rappel, Marwan Mabrouk figure sur une liste noire de 110 proches de Ben Ali soupçonnés de malversations et d’enrichissement illégal. Cette liste a été établie par le conseil des ministres tunisien le 15 février 2011. La nationalisation de ses parts dans Orange Tunisie, revendiquée par les syndicats, n’a pas été écartée par le gouvernement.

Source : Maghreb Émergent au 04/03/2011

Aucun commentaire: