lundi 17 janvier 2011

Tunisiana - Qtel attend de connaître le sort des 25% de la comète Sakher EL Materi


Sawiris a tiré sa révérence à temps de Tunisiana en réalisant une excellente affaire. Qtel a racheté 25% des parts et s’est retrouvée avec 75% associé à Sakher El Materi, le gendre et son compère, l’homme d’affaires et ancien footballeur Hamdi Meddeb. L’opérateur qatari est aujourd’hui associé à 25% en fuite. Son contrôle sur Tunisiana ne devrait pas être remis en cause. Il lui reste à attendre ce que la Tunisie nouvelle fera des biens « mal acquis » par les membres des clans familiaux qui contrôlaient le pays.

Mais où est donc passé le Tycoon et député tunisien Mohamed Sakher El Materi ? Sa dernière apparition à Tunis date du 13 janvier et elle a été documentée par une presse tunisienne encore aux ordres malgré les signes annonciateurs de la chute de la dictature. C’était à la chambre des députés, le « gendre » répondait aux rumeurs annonçant sa fuite au Canada où il se serait installé, avec sa femme Nesrine Ben Ali, dans la « modeste cabane » qu’il avait acquise là-bas, à Westmount, à Montréal, pour la modique somme de 2,5 millions de dollars. « J’étais au Canada, mais je n’ai nullement fui le pays et il n’y a aucune raison pour cela ». Le gendre a même affirmé qu’il n’a jamais douté « un instant » du pays et qu’il « continuera d’investir et de créer de l’emploi ». Le boulimique homme d’affaires pressentait pourtant bien que les choses tournaient au vinaigre et, citations coraniques à l’appui, il a lancé : « mettons la main dans la main et retirons cette haine qui remplit nos cœurs. Construisons ensemble la Tunisie, préservons nos acquis, au lieu de détruire. ». Ensuite, Nessma TV, soudain « libre, » a annoncé qu’il avait été arrêté. Fausse nouvelle. On l’a donné ensuite, à Paris, et finalement à Dubaï. Sans doute a-t-il rejoint la « famille » en Arabie Saoudite où il sera contraint à faire la pause et méditer sur la fragile d’un empire constitué en peu de temps et qui s’effondre avec la chute du régime. Le compte twitter de Sakher El Materi est silencieux depuis le 13 janvier, son compte facebook où il avait des milliers de « fans », volontiers flagorneurs, a disparu. Des signes extérieurs visibles de modernité qui cessent de se faire voir et signale une fin.

Tunisiana, dernier acte du boulimique El Materi

Une semaine auparavant, Sakher El Materi, présidait le Conseil d’administration de Tunisiana, sa dernière acquisition qui lui mettait le pied dans l’étrier dans le secteur de la téléphonie mobile en partenariat avec l’un des plus importants opérateurs de la région Mena, Qtel. Le 5 janvier, alors que le pays était déjà, à la suite de l’immolation de Mohamed Bouazizi, le 17 décembre, en passage de la révulsion à la révolution, se tenait le premier Conseil d’Administration de Tunisiana, dans sa nouvelle configuration. Celle née de la vente, pour 1,2 milliards de dollars, des parts d’Orascom Telecom à Qatar telecom (Qtel) et au consortium tunisien constitué par Princesse Holding et le groupe Hamdi Meddeb. Le gouvernement tunisien, hostile à l’arrivée de VimpelCom, a fortement incité Qtel a acheté les parts d’Orascom Telecom tout en plaçant dans l’affaire Sakher El Materi. Affaire rondement menée : 75% pour Qtel et 25% pour le consortium tunisien qui prennent ainsi le contrôle du premier opérateur du pays ( 5,8 millions d’abonnés, 53% de parts de marché). Ce 5 janvier, les nouveaux propriétaires semblaient encore croire que Sakher El Materi avait toujours l’avenir qui lui était prédestinée dans une Tunisie soumise à Ben Ali ; certains même pronostiquaient, qu’avec le soutien de Leila Trabelsi, il pourrait même prétendre à la succession. Mais en attendant ce jour qui ne viendra pas, il devenait président du Conseil d’Administration de Tunisiana, un poste de plus, dans ses nombreuses fonctions. L’apothéose en somme. Le PDG de Qtel en personne, Cheikh Abdallah Mohamed Al Thani, était-là, flanqués de ses deux nouveaux co-actionnaires tunisiens, MM. Sakher El Matéri et Hamdi El Meddeb. Cheikh Abdallah annonçait même que Tunisiana allait être cotée à la Bourse de Tunis au cours du premier semestre 2011 et que de nombreux projets étaient prévus dans le fixe, la data et l’internet. Il a révélé aussi que « Tunisiana a déjà déposé une demande pour acquérir une licence 3 G, et nous attendons la réponse». Personne ne doutait qu’avec un aussi illustre associé tunisien, cela se fera vite. C’est moins sur.

Des comptes à rendre

Naguib Sawiris qui a fait une excellente affaire en vendant ses 50% dans Tunisiana à 300 millions de dollars de plus que leur valeur du marché doit se sentir heureux d’avoir soldé à temps. Ce 5 janvier Orascom Telecom Holding (OTH) annonçait de son coté la finalisation de la vente de sa participation dans Tunisiana (OTT) pour un total de « contrepartie en espèces de 1,2 milliards de dollars, correspondant à une valeur d'entreprise égale à 6,7 fois l'EBITDA 2009 de Tunisiana ». La transaction, expliquait le groupe de Sawiris, génère plus de 40% par an retour sur investissement OTH dans l'entreprise depuis 2003. Une sortie heureuse pour Sawiris qui a, en outre, dans sa transaction tunisienne un élément de « comparaison ». Qtel qui détient désormais 75% dans Tunisiana est associé à 25% de parts en fuite. Tunisiana est le dernier épisode de la boulimie d’acquisition de Sakher EL Materi qui vient d’être stoppée net par la révolution Bouazizi. Qtel restera le propriétaire de Tunisiana – la nationalisation n’est guère envisageable, ce n’est pas très tunisien- mais avec une incertitude sur le partenaire tunisien. Une des trois commissions mise en place pour organiser la transition porte sur les accusations de corruption à l’encontre des hommes de Ben Ali et plus précisément des membres de sa famille et de celle de son épouse les Trabelsi. Les 25% du consortium tunisien partenaire de Qtel sont en suspens. Sakher El Materi est out. Son associé dans le consortium, l’ancien footballeur de l’Espérence de Tunis Hamdi Medded - patron de la Société tunisienne des industries alimentaires (STIAL) dont 50% ont été rachetés par Danone, actionnaire de la Banque Zitouna de Sakher El Materi - risque, lui aussi, de l’être et de devoir donner des explications du fait de sa proximité avec l’univers indéniablement corrompu de la famille. Qtel attend, en silence, de connaître qui sera son associé après l’extinction de l’étoile de Sakher El Materi.

Source : Maghreb Emergent au 17/01/2011


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