samedi 29 janvier 2011

Coupure d'internet et impossibilité d'envoi de sms : Une première mondiale par son ampleur

Avant l’aube, des internautes du Caire avaient déjà fait état de l’impossibilité de se connecter à Internet, tandis que d’autres signalaient des lenteurs et des coupures intermittentes.

Internet a été paralysé dans plusieurs régions d’Egypte après le déclenchement, hier, de nouvelles protestations contre le régime du président Hosni Moubarak. Déjà, dès jeudi soir, l’accès à internet était fortement perturbé. Il n’était plus possible non plus d’envoyer des SMS avec le Blackberry. Des réseaux sociaux tels que twitter, facebook et la messagerie électronique Gmail ont été entièrement bloqués. L’opposition avait appelé à des manifestations de masse hier via les sites de socialisation et par e-mail. Seul le fournisseur d’accès Noor serait encore actif en Egypte.

L’explication est simple : il fournit un accès interne à Internet à de nombreux groupes implantés en Egypte, parmi lesquels Coca-Cola, Toyota, Renault, Mitsubishi, FedEx, Nestlé ou Lafarge. «Le réseau internet est coupé aujourd’hui (vendredi) en Egypte», a déclaré à l’AFP la réception d’un grand hôtel de la capitale, une information confirmée par d’autres établissements.


Avant l’aube, des internautes du Caire avaient déjà fait état de l’impossibilité de se connecter à Internet, tandis que d’autres signalaient des lenteurs et des coupures intermittentes. En avril 2008, des milliers d’Egyptiens avaient exprimé sur internet leur appui à des ouvriers protestant dans le delta du Nil contre la cherté de la vie. Le groupe facebook, né de cette journée de printemps, a rapidement pris de l’ampleur. Le Mouvement des jeunes du 6 avril, une organisation affiliée à aucun parti politique, moissonnant ses premiers appuis au sein d’une jeunesse éduquée, avait appelé ses membres à se vêtir de noir en signe de protestation contre le pouvoir. Le mouvement, qui fonctionne à la fois comme un forum de discussion et un haut-parleur géant appelant ses membres à manifester, avait appuyé, en juillet 2010, la pétition de l’opposant Mohamed El Baradei, ancien patron de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) devenu un rival du président Moubarak.


Dans la foulée du soulèvement populaire en Tunisie ayant chassé du pouvoir le président Zine El Abidine Ben Ali, le Mouvement a lancé des appels à la mobilisation à ses 86 000 membres sur Internet. En Egypte, avec les deux tiers de la population qui ont moins de trente ans, c’est bien du web que pourrait partir une révolution qui n’aura, celle-là, rien de virtuel. Dans ce pays où l’opposition est verrouillée et la presse régulièrement poursuivie, c’est sur Internet que s’invente la démocratie. Il faut savoir que l’Egypte est le pays qui compte le plus d’internautes dans le monde arabe, selon des statistiques fournies par l’International Telecommunication Union (17 millions) et qui a suivi de près la situation tunisienne. Certains se sont pris à rêver d’un scénario identique sur les bords du Nil.


Quitte à braver les autorités qui, si elles se livrent à une censure «moins grave» qu’en Tunisie avant la chute de Ben Ali, selon RSF, sont tout de même engagées dans une chasse aux blogueurs trop critiques envers le pouvoir. Le blogueur égyptien Khaled Saïd est ainsi devenu une figure de proue des mouvements de contestation du pouvoir après avoir été battu à mort, en juin 2010, pour avoir diffusé une vidéo dans laquelle des policiers étaient montrés en flagrant délit de corruption. «Selon nos informations, environ 88% du réseau internet n’est plus disponible en Egypte, c’est une première dans l’histoire de l’internet», a déclaré à l’AFP Rik Ferguson, expert en sécurité pour Trend Micro, troisième éditeur de solutions de sécurité mondiale. Outre le web, les réseaux de téléphonie mobile sont également perturbés pour empêcher les échanges de SMS. L’Egypte – comme la Tunisie – fait partie de la liste des 13 pays classés «ennemis d’internet» par Reporters sans frontières.


«Contrairement à d’autres pays comme la Tunisie, le gouvernement égyptien ne peut pas appuyer sur un bouton pour tout couper. Mais là, il y a eu sans aucun doute pression sur les opérateurs. Et ces opérateurs, aujourd’hui, ne répondent plus au téléphone pour donner des explications», souligne une source de RSF. L’Egypte compte quatre principaux fournisseurs d’accès au web dont la licence a été délivrée par l’Autorité de régulation des télécommunications égyptienne : Link Egypt, Vodafone/Raya, Telecom Egypt et Etisalat Misr. Sur son site web, Vodafone a publié une déclaration qui confirme que «tous les opérateurs de téléphonie mobile en Egypte ont reçu pour instruction de suspendre les services dans certains domaines. En vertu de la législation égyptienne, les autorités ont le droit d’émettre une telle ordonnance et nous sommes obligés de nous y conformer. Les autorités égyptiennes vont clarifier la situation en temps voulu».

Source : Journal El Watan du 29/01/2011

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