lundi 26 avril 2010

Une cession d’Orascom Télécom à MTN pourrait créer un imbroglio juridique


«Quelque chose se passe », lit-on sur le Financial Times. Il ne se passe rien, laisse entendre le ministre algérien des TIC. L’éventualité d’un rachat d’Orascom Télécom (OTH) par le géant sud-africain MTN fait des vagues sur les marchés boursiers. Elle pourrait créer un imbroglio juridique pour le cas de Djezzy.

A Alger, Hamid Bessalah, ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication a choisi de botter en touche. « Nous n’avons aucune information de ce genre » a-t-il déclaré à l’émission « En toute franchise » de la chaine III. Si le ministre algérien pense à des informations fournies par Orascom Télécom, les choses sont en effet claires. L’opérateur égyptien n’a pas confirmé – il n’a pas infirmé non plus – les nouvelles sur des pourparlers avec MTN. Hier, la Bourse égyptienne a suspendu lundi la cotation du titre d'Orascom (ORTE.CA) dans l'attente de la publication mardi d'une « information d'importance ».

Orascom a indiqué à la plate-forme boursière qu'il publierait des informations cruciales, sans fournir davantage de détails. Le sud-africain MTN, plus communicatif, a confirmé l’existence de pourparlers tout en précisant qu’il ne peut préjuger s’ils seront concluants ou non.

Ces pourparlers portent sur une cession des actifs d’Orascom dans différents pays dont la Tunisie, l’Egypte, le Zimbabwe ou l’Algérie. MTN qui est déjà le plus grand groupe africain de téléphonie mobile conforterait ainsi sa position de leader sur le continent. La transaction porterait sur la somme de 12 milliards de dollars que MTN devra lever sur le marché financier international.

En délicatesse avec le fisc, Orascom Télécom a du s’acquitter de la majeure partie des sommes qui lui était réclamées par la Direction Générale des Impôts. Il ne resterait, selon OTA, qu’une somme de 25 millions de dollars dont le versement dépendrait de l’issue de la procédure judiciaire.

Options ouvertes

Ce contentieux expliquerait le refus renouvelé de la Banque d’Algérie d’autoriser le transfert des dividendes d’OTA. Selon les nouvelles règles en vigueur, l’autorisation de transferts des dividendes des entreprises étrangères est soumise à la délivrance d’un quitus des services fiscaux.

La situation reste ainsi bloquée alors qu’OTA affirmait dans son dernier communiqué avoir apuré sa situation vis-à-vis du fisc. La ligne officielle des autorités algériennes est qu’ils n’exigent pas le départ d’Orascom Télécom mais qu’il est tenu de se mettre en règle avec les impôts comme toutes les autres entreprises.

Le groupe Orascom Télécom de son coté a veillé à laisser toutes les options ouvertes sur sa présence en Algérie. En février dernier, Naguib Sawiris, a déclaré au Wall Street Journal, avoir besoin de comprendre si ses investissements sont encore les bienvenus en Algérie ou pas. « Le cas échéant, nous serons dans l’obligation d’envisager d’autres options».

Même si la cession d’Orascom Télécom au sud-africain demeure en l’état d’hypothèse, beaucoup se demandent si elle ne va pas provoquer un grand imbroglio juridique. Deux grands précédents en matière de cession existent en Algérie. En 2007, en rachetant la majorité des actions de Wataniya International, l’opérateur qatari Qtel est devenu propriétaire de Wataniya Algérie, Nedjma. Au regard de la réglementation en vigueur Wataniya Télécom restait toujours l’opérateur de référence de Nedjma et l’autorité de régulation n’a pas eu à donner son aval. A la fin de l’année 2007, une opération similaire s’est soldée par la cession pour 8,8 milliards d’euros de la filière Orascom Cement au groupe français Lafarge! qui se retrouvait ainsi propriétaire de deux cimenteries algériennes, à Msila Et Sig.

Cela est-il reproductible aujourd’hui dans le cas d’un éventuel rachat d’Orascom Télécom par MTN alors que l’Algérie a introduit, justement après la cession des cimenteries à Lafarge, un changement dans sa législation en introduisant un droit de préemption de l’Etat ou des entreprises publiques ?


Refiler le problème à … l’ami Zuma


Selon la loi de finances complémentaire (LFC 2009) « l’Etat ainsi que les entreprises publiques économiques disposent d’un droit de préemption sur toutes les cessions de participations des actionnaires étrangers ou au profit d’actionnaires étrangers ».


Certains estiment cependant que cette «mise à jour » du code de l’investissement par la LFC ne jouerait que dans le cas d’une cession des seuls actifs de Djezzy. Elle ne serait pas de nature à empêcher la réédition à l’international des opérations semblables à celles de Qtel et Lafarge. Il suffirait, indique-t-on, que la maison-mère, en l’occurrence la holding Orascom Télécom soit rachetée par MTN.


En termes de droit, Orascom Télécom resterait l’opérateur de référence de Djezzy et l’Etat algérien ne serait pas dans la possibilité de s’opposer à la vente d’Orascom Télécom qui est cotée à la Bourse du Caire.


Pour ces analystes, à moins de l’existence d’une clause prévue contractuellement, c’est le cas avec Dubaï Port World, qui a pris les ports d’Alger et de Djendjen en concession, le droit de préemption pourrait ne pas jouer.


Il est clair, estiment certains analystes, « qu’un aval des autorités algériennes serait souhaitable. Mais Orascom Télécom pourrait choisir d’essayer de passer outre et de conclure. Le problème serait refilé à MTN… et sans doute à notre ami Jacob Zuma », estime un spécialiste.

Source : Maghreb Emergent au 26/04/2010

Aucun commentaire: