mercredi 9 novembre 2011

Les failles du "e-gov" au Maroc retardent la "e-citoyenneté"

A deux ans de l’échéance du plan « Maroc Numeric 2013 », une étude analytique, intitulée « e-Gov et accès à l’information au Maroc », réalisée par Rachid Jankari de Jankari Consulting (www.jankari-consulting.com), pointe du doigt les principales faiblesses de la démarche e-gouvernement. L’analyse de 12 indicateurs conclue à une « gestion chaotique du domaine ".gov.ma" » laissé « à la merci des pirates et des hackers », manque d’information, « déficit de notoriété et de lisibilité » et « sans avantages numériques ».

Publiée le 22 octobre 2011, la radioscopie de Jankari Consulting a pour objectif de « mesurer, d'une manière qualitative, la visibilité et la lisibilité en ligne de l'information, des démarches à effectuer et des droits et des obligations des citoyens et des entreprises ». Les conclusions de l’étude se basent sur une « analyse sélective » du contenu et des formes des sites institutionnels opérationnels au Maroc.

Dans le volet consacré au nom de domaine ".gov.ma", l’étude constate « l’absence d'une gestion rigoureuse de l'extension du domaine gouvernemental. Théoriquement réservé exclusivement à l’administration gouvernementale, le domaine ".gov" au Maroc est à la portée de tout le monde. Ainsi, selon l’analyse, il existe « plus de 550 noms de domaine ".gov.ma" » dont « 76 ont été octroyés à des particuliers et des entreprises privées ».

En matière de sécurité, « l'analyse des sites e-gov au Maroc fait ressortir une vulnérabilité à grande échelle des sites publics » et gouvernementaux « à la merci d'attaque de hackers nationaux et internationaux ».

Selon Rachid Jankari, cette situation « renforce la méfiance des citoyens et des entreprises quant à la capacité des pouvoirs publics à sécuriser et protéger les données privées et bancaires » et du « paiement en ligne ».

Un rating qui s’améliore… au-delà de la 100e place

Un autre volet exploré par l’étude est consacré aux performances du Maroc dans le dernier classement mondial de l'indice des Nations Unies (ONU) sur le "e-government" intitulé "2010 UN Global E-Government readiness survey".

Classé 126e sur 192 pays, avec « 14 places de gagnées par rapport au classement de 2008 », le Maroc reste néanmoins « devancé à l'échelle arabe et maghrébine, par : la Tunisie (66ème), Oman (82ème), l'Egypte (86ème), le Liban (93ème) ou encore la Libye (114ème) », constate l’étude.

L’analyse relève également une « hétérogénéité des sites gouvernementaux ». Il est constaté « l’absence d'un schéma directeur des sites web gouvernementaux et des services en ligne », l’inexistence « d'une politique cohérente au niveau de la sémantique des noms des sites et des noms de rubriques », et le non respect du « principe de nommage .gov.ma » par tous les sites publics.

Cette situation conduit à une « faiblesse du référencement des sites sur internet » et a pour conséquence de rendre difficile d’identification du « site public approprié », ajoute l’étude.

Pour ce qui est de l’accessibilité de l’information institutionnelle au grand public, l’étude estime qu’il existe une « barrière à l’entrée pour les citoyens » du fait que la « majorité des sites e-gov en ligne sont en langue française ».

« Un choix linguistique qui pénalise les internautes mono-langue » et « l’absence de politique linguistique .gov.ma (qui) sanctionne l'accès au grand public aux ressources/services/informations gouvernementales », ajoute Rachid Jankari.

Ce choix linguistique induit également un « déficit de diplomatie numérique » en raison de la « faiblesse du contenu en anglais et en espagnol » des sites gouvernementaux marocains.

Encore faut-il que ces sites soient mis à jour régulièrement, ce qui est loin d’être le cas, comme le constate l’étude. « Les sites egov marocains n'offrent pas des garanties de fiabilité des informations : redondance et absence de mise à jour », lit-on dans le document qui relève, dans le même chapitre, « fréquence élevée des liens morts : erreur 404 », avec quelques exemples à l’appui.

« Un e-Gov sans avantages numériques »

De manière générale, il est constaté « une disponibilité parcellaire et fragmentée des informations publiques » et que « seuls quelques sites mettent en ligne un organigramme bien que non actualisé, des documents d'intérêt public mais anciens, et des documents servant à la prise de décision qui ne sont plus d'actualité ».

L’étude relève également une « faiblesse des services » de paiement en ligne offerts aux citoyens et aux entreprises. Le document cite quatre cas de « services transactionnels », notamment celui de la Trésorerie générale du Royaume pour le paiement en ligne des taxes locales (d'habitation, des services communaux et de la taxe professionnelle), de l’Office Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC) qui permet « le paiement via abonnement ou carte bancaire », de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) qui offre des services de télé-déclaration et de télépaiement des cotisations sociales, et des télé-services de la Direction générale des impôts destinés aux grandes entreprises de Rabat et de Casablanca.

Dans le chapitre « interactivité », l’étude relève qu’un fonctionnement en « boîte noire » des sites Web de l’administration publique. « Les sites offrent des formulaires de contact ou e-mail, mais rien ne garantit à l'internaute ni le délai de traitement ni celui de réponse ». « Très peu d'administrations, ex Douane, offrent la possibilité de poser des questions via e-mail ou de communiquer avec des fonctionnaires », lit-on dans le onzième point de cette analyse.

L’étude conclue sur « l’absence d'avantage numérique pour encourager les citoyens à accomplir les démarches administratives en ligne y compris celles qui exigent le paiement en ligne ».

Source : Maghreb Émergent au 09/11/2011

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