lundi 26 septembre 2011

L’expert Farid Bourennani : "L’Internet mobile devrait pallier l’insuffisance de l’Adsl"

Qu’est ce qui va changer dans le paysage économique et dans l’accès à Internet en Algérie après l’introduction de la troisième génération de la téléphonie mobile (3G) ? Dans cet entretien, l’expert Farid Bourennani explore les évolutions possibles. Il analyse les capacités de chacun des trois opérateurs pour le déploiement de la 3G.

Quel changement peut introduire la 3G dans le paysage de la téléphonie mobile ?

Je rappelle d’emblée que le GSM 3G date déjà de 2003 et que les pays développés en sont à la 4G. L’absence délibérée de concurrence pour le fixe et l’Adsl et les piètres offres d’Algérie Telecom ont maintenu l’Algérie en état de sous-développement. Il est à espérer que nous nous orientons vers la 3G+ (HSDPA/HSUPA) et que l’Etat sera exigeant en terme de couverture et de débit minimum. Autrement, cela ne sera que de la poudre aux yeux. L’Internet mobile devrait pallier l’insuffisance des offres Adsl. Nous devrions entrer dans une ère de démocratisation réelle de l’accès à l’internet, sous réserve que les prix soient accessibles au plus grand nombre.


Qui vous parait le mieux placé parmi les opérateurs pour décrocher la licence 3G ?

Pour l’intérêt de notre pays, les 3 opérateurs doivent avoir droit à une licence. Sinon l’Etat va créer des entraves de nature compétitives entre les 3 acteurs, qui pourraient conduire à des situations d’opérateurs dominants comme ce fut le cas au démarrage du mobile et qui se sont faites au détriment des consommateurs (faible disponibilité, piètre qualité et prix élevés). Qu’un opérateur n’ait pas de licence 3G reviendrait à maintenir des millions d’algériens en marge de l’apport des services et connaissances véhiculés via Internet. Il est évident que les opérateurs affiliés à des groupes internationaux, que sont Wataniya Telecom Algérie (WTA-Nedjma) et Orascom Telecom Algérie (OTA-Djezzy), seront plus réactifs en termes de produits et services afin de bien exploiter les potentialités offertes par la 3G+. L’opérateur public qui, depuis sa création, est orphelin de partenaire technique international ne sera pas un acteur meneur mais un suiveur sur le marché.


Nedjma semble être culturellement le plus apte à dynamiser le marché. En tant que 3ème entrant sur le marché en 2004, il a mis en œuvre une stratégie de différenciation d’offre non uniquement basée sur la voix mais également sur la data et le multimédia. WTA était troisième, à présent il talonne Mobilis qu’il espère devancer sous peu pour ensuite se lancer derrière le leader OTA. WTA dispose d’une infrastructure réseau plus récente et moderne que celle de ses concurrents.


Djezzy quant à lui, et compte-tenu des obstacles de nature conflictuels auxquels il a à faire face, s’est trouvé freiné dans son développement. Ces deux dernières années, OTA a moins animé le marché et ses parts de marché se sont érodées passant de 61% à plus ou moins 50%. Néanmoins sa santé financière reste extrêmement solide et lui donne des capacités d’investissement très importante. Aujourd’hui OTA bénéficie à la fois de synergies et d’expérience de Orascom Telecom holding mais également du Groupe Vimpelcom devenu un acteur télécom de premier rang mondial. Mais il y a un détail à ne pas négliger qui constitue un obstacle majeur pour OTA qui est toujours interdit de domiciliation d’opérations d’importations. Comment, dans ce cas là, pourrait-il investir dans de nouveaux équipements ?


S’agissant de Mobilis, en dehors de son appartenance au Groupe Algérie Telecom et du nombre d’abonnés déclarés à l’ARPT, sa performance de gestion est très opaque. Pas de rapport annuel publié, nous ne connaissons pas ses états financiers, ni en terme de comptes d’exploitations, ni en terme bilanciel (actif/passif). Les services 3G+ sont une occasion de redistribution des parts de marché.


Quelle sera d'après vous la fourchette de mise à prix, comparé à celles des 3 autres pays d'Afrique du Nord ayant déjà introduit la 3G ?

Compte tenu du faible développement du secteur des TIC dans notre pays et de la nécessité de réduire les retards, chercher à maximiser le prix de la licence serait une erreur de plus. L’Etat se doit de pousser les opérateurs à acquérir la licence et à investir massivement dans les plus brefs délais dans les infrastructures nécessaires à une bonne disponibilité des accès 3G/3G+. Il devra également veiller à une accessibilité tarifaire pour les clients. Il est plus judicieux d’être attentif au coût global (coût de licence + coût de l’infrastructure) et raccourcir aux maximum les délais d’investissement.


Si l'introduction de la 3G est nécessaire, est-elle suffisante pour booster d'autres secteurs de l'économie ?

La 3G+ est un préalable structurant pour permettre l’émergence de nouvelles activités marchandes et non marchandes (eBanking, eCommerce, eGovernance, dématérialisation de tout un tas de supports). La législation doit vite adopter des lois rendant légaux les supports dématérialisés et les signatures électroniques.


Source : Maghreb Émergent au 26/09/2011

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