lundi 9 janvier 2012

Farid Bourennani : «J’avais dit qu’il ne pouvait pas y avoir préemption dans Djezzy, nous y sommes ! »

L’expert financier international Farid Bourennani n’a pas de mots assez durs pour railler « la fièvre virale » qui s’est emparée de la presse algérienne qui parle de la prise de majorité de l’Etat Algérien dans Djezzy alors « qu’il n’existe ni informations, ni montants, ni délais ». Pour lui, l’Etat renonce discrètement au droit de préemption. Ce qu’il avait lui-même pronostiquait dès la fin 2009. Farid Bourennani ne croit même pas au « bricolage du 51% » annoncé.

L’annonce par le ministre algérien des PTIC Moussa Benhamadi que l’Etat algérien allait acquérir 51% de Djezzy, après un accord de principe avec Vimpelcom le propriétaire russe a été prise pour « argent comptant » par la presse algérienne. Une réaction qui a exaspéré Farid Bourennani, familier des fusions acquisitions en particulier dans le secteur de la téléphonie mobile. Pour l’algérien, expert financier international établit en France, il existe « une épidémie virale» sur la prise de majorité de l’Etat Algérien, sans que personne ne se pose les questions préalables : « je n’ai jamais vu de transactions de la sorte, ou il n’existe ni informations sur l’entreprise que l’on va acheter, ni montant de l’offre d’achat, ni délais de l’opération ». Farid Bourrenani rappelle, bien à propos, qu’aux dernières nouvelles encore, l’Etat algérien n’avait toujours pas pu accéder aux informations confidentielles qui lui permettraient d’avoir une idée plus précise de la valeur d’OTA. « Comment dans ce cas peut-il décider d’acheter 51% de quelque chose qu’il ne connait pas ? ». En réalité ce qu’il faut retenir de l’annonce faite par le ministre des PTIC Moussa Benhamadi, selon l’expert financier, c’est que l’Algérie a finalement abandonné le « droit de préemption ». « L’Etat ne parle plus avec le vendeur, mais avec l’acheteur. Nous ne sommes plus dans le droit de préemption, sur lequel tant de personnes ont glosé depuis deux ans. Lorsqu’on parle avec le nouvel acquéreur, nous sommes dans une négociation ouverte. Le droit de préemption s’applique à celui qui vend pas à celui qui a acheté ». Farid Bourennani précise en outre « le droit de préemption ne peut pas être partiel. Il est intégral ».

Tout ça pour ça !

Le repli sur les 51% annonce bien que l’Etat algérien ne peut pas recourir à la disposition intégrée dans la LFC de 2009 pour acquérir Orascom Télécom Algérie (OTA), détenteur de la licence GSM de l’enseigne Djezzy. Mais même ce repli annoncé en catimini à El Tarf par le ministre Moussa Benhamadi n’a pas de grâce aux yeux de Farid Bourennani : « Je ne crois pas à ce bricolage. L’Etat algérien ne sait même pas combien va coûter l’acquisition de 51% de OTA. Il n’a toujours pas accéder aux données qui lui permettraient de ce se faire une idée. Et puis à la fin il faudra bien virer à Vimpelcom quelque chose de l’ordre des 3 milliards d’euros. Sans compter que nous ne savons rien sur le pacte des actionnaires qui peut rendre encore plus chère l’entrée d’un nouvel actionnaire. Tous les pactes d’actionnaires visent à cela ». Et l’expert de s’exclamer : « et tout cela pourquoi ? Pour devenir associé de Vimpelcom en Algérie ? ». Jugeant comme une « destruction d’actifs » la tentative d’acquisition en force de OTA par l’Etat Algérie, Farid Bourennani exprimait des doutes, l’été dernier sur l’issue de l’opération d’évaluation de Djezzy confié par le ministère des finances au cabinet conseil Shearman and Sterling LLP (France) : « le calendrier annoncé pour la poursuite de l’évaluation/acquisition, fixé initialement à fin Mai 2011, est oublié et le dossier mis sous silence ». Il affirmait alors sur Maghrebemergent.info : « l’entêtement à recourir au droit de préemption conduirait inéluctablement à l’arbitrage avec des probabilités de condamnation élevée » contre l’Etat algérien. Il convient de relever que sur ce point les évènements sont entrain de lui donner raison.

Source : Maghreb Émergent au 09/01/2012

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