mercredi 8 février 2012

Le dégroupage de la boucle locale tourne en rond au Maghreb

Considéré comme un pas essentiel vers un marché concurrentiel dans la téléphonie fixe et de l’Internet haut débit (Adsl), le dégroupage de la boucle locale au Maghreb avance différemment selon les pays. Consacré au Maroc, sans les résultats espérés, engagé lentement en Tunisie, il est promis en Algérie pour 2012, mais devrait prendre encore plusieurs années avant d’être effectif. Au grand dam de la concurrence et, peut être, au grand profit de la 3G.

Au Maroc, l’idée du dégroupage de la boucle locale a été lancée officiellement en 2004 par l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) dans le cadre des « objectifs et évolution des télécoms » pour la période 2004-2008.

Il a fallut attendre trois ans plus tard, en 2007, pour voir l’opérateur historique, Itissalat Al Maghrib (IAM ou Maroc Télécom), proposer un « dégroupage partiel » qui consistait à louer une bande de fréquences hautes permettant à un opérateur tiers d’offrir un service Internet Adsl à ses clients. Censée être moins couteuse que le dégroupage total, l’offre d’IAM n’a pas suscité de l’engouement.

Un an plus tard, IAM passe au dégroupage total (voix et données) de la boucle télécoms. A ce niveau, la réussite est plus dans le volet téléphonie fixe qui a vu l’entrée de deux autres opérateurs, que dans le segment Adsl où l’opérateur historique reste dominant.

En arrivant en même temps que le déploiement de la 3G (Internet mobile haut débit), l’offre de dégroupage total n’a pas connu un grand succès concernant l’Internet. Résultat, à fin décembre 2011, le marché de l’Internet Adsl reste dominé à 99,87% par Itissalat Al Maghrib.

Quant à la téléphonie fixe, elle a connu un essor important puisque au moins un des deux opérateurs entrés en lice a pu prendre une part importante dans ce segment. A fin 2011, Wana Corporate détenait une part de marché globale dans le fixe de 64,59% (dont 75% dans le segment résidentiel), contre 34%,79% à IAM, et 0,62% pour MediTelecom.

Lent processus en Tunisie

En Tunisie, et après la révision, en 2008, du code des télécommunications. L’Instance Nationale des Télécommunications (INT, régulateur) a adopté, en avril 2009, une décision « fixant les éléments relatifs à l’accès à la boucle locale, à la colocalisation physique et à l’utilisation commune de l’infrastructure que doit contenir l’Offre Technique et Tarifaire d’Interconnexion de la Société Nationale des Télécommunications ». En octobre de la même année, « un groupe de travail permanent » a été institué pour « le suivi de la mise en œuvre du dégroupage de la boucle locale ».

Le décret consacré à l’accès à la boucle locale, promulgué en septembre 2008, prévoit deux formes de dégroupage. Un « dégroupage total qui consiste en la mise à disposition de la partie métallique précitée du réseau permettant l’accès totalement dégroupé à la boucle locale » et un « dégroupage partiel qui consiste en la mise à disposition des fréquences non vocales disponibles sur cette partie du réseau permettant l’accès partagé à la boucle locale ».

En 22 septembre 2010, l’INT adopte une décision « portant établissement de nomenclature des coûts pertinents pour le dégroupage de la boucle locale ». Dans ce document, sont détaillés les méthodes de calcul des coûts de l’ensemble des prestations et équipements entrant dans le dégroupage.

Malgré tout ce travail réglementaire, les choses n’avancent pas beaucoup. Lors de la réunion d’information du 06 décembre 2011, portant sur l’ouverture de la boucle locale à la concurrence, de Tunisie Telecom (opérateur historique) a estimé que « le respect du principe réglementaire d’orientation des tarifs du dégroupage vers les coûts dicté par le décret (précité, ndlr) nécessite de rééquilibrer les tarifs de détail de la téléphonie fixe de Tunisie Telecom qui sont estimés être en dessous des coûts ».

En réponse à cette doléance, l’INT a promis « d’accompagner Tunisie Telecom dans la réalisation de son plan de rééquilibrage tarifaire dans les meilleures conditions ». Dossier à suivre.

L’Algérie, peut mieux faire… si la volonté y est

En Algérie, une législation en faveur du dégroupage de la boucle locale est prévue pour cette année, dans le cadre de la révision de la loi sur les télécommunications. Dans l’entretien accordé au Quotidien d’Oran/Maghreb Emergent par le ministre de la poste, des technologies de l’information et de la communication (MPTIC), Moussa Benhamadi, avait expliqué que « dans le domaine des télécoms » le dégroupage « est essentiel si nous voulons booster la concurrence et donner la possibilité à d’autres (opérateurs, ndlr) de venir investir sur la boucle locale pour offrir des services à haute valeur ajoutée ».

Selon lui, Algérie Télécoms (AT) devrait se spécialiser « dans sa mission d’opérateur des opérateurs », qu’elle « se décharge de la prise en charge des besoins des citoyens à travers des ISP ou d’autres opérateurs », pour se consacrer à « développer son réseau haut débit et assurer la connexion à ces opérateurs ».

A ce stade, les contours du dégroupage ne sont pas encore clairement définis pour le cas de l’Algérie. Plus tôt la loi sera adoptée, plus vite le secteur des TIC entamera un processus qui risque d’être aussi long, si ce n’est plus, que celui de ses voisins marocains et tunisiens pour voir enfin un dégroupage total de la boucle locale pour le grand bénéfice de l’usager.

Source : Maghreb Émergent au 08/02/2012

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