«Nous ne savions pas, sinon nous aurions proposé au collègue ministre de l’Intérieur, qui est là à Alger, de venir avec nous. Il est à la recherche d’une carte d’identité sécurisée », a déclaré, étonné, le ministre nigérien de la Communication et des Technologies de l’information, Salifou Labo Bouché, à l’occasion de sa visite de la chaîne de production de HB Technologie, producteur algérien de cartes dites «intelligentes». La sentence est on ne peut mieux révélatrice de la conception que se fait le ministre de l’Intérieur, Daho Ould Kablia, de la sécurité des données et de la protection de la production nationale.
Membre d’une délégation de haut rang en visite à Alger depuis lundi dans le cadre de la coopération bilatérale, Salifou Labo Bouché a effectué hier en début d’après-midi une visite dans le site de production de HB Technologies, implantée dans la zone industrielle de Rouiba. Accompagné de ses collaborateurs et du chef de cabinet de son homologue algérien, Moussa Benhamadi, le ministre nigérien n’a pas cessé d’exprimer son étonnement tout au long des explications sur le processus de fabrication des cartes intelligentes fournies par le DG de cette entreprise, Abdelhamid Benyoucef, la seule à l’échelle africaine d’ailleurs. «Aucun ingénieur étranger ne vous assiste dans la fabrication de ces cartes», ne cessait- il de répéter. Fondée en 2004, entrée en production en 2006 et disposant d’un équipement ultramoderne et certifié ISO 9001-2008, HB Technologies active dans «le développement de solutions complètes, les documents d’identification à reconnaissance biométrique, les cartes bancaires conformes aux normes et exigences Visa International et les cartes pour la téléphonie (cartes prépayées, cartes GSM Sil, carte Java Sim et Java Usim). Elle dispose d’un portefeuille clients assez important. Parmi ces plus importants clients, il y a Algérie Poste (13 millions de comptes), Société Générale et Gulf Bank Algeria (AGB), en plus des opérateurs de téléphonie mobile Mobilis, Djezzy, et une multitude de sociétés commerciales proposant des cartes de fidélité pour leurs clients. Des cartes «hautement sécurisées », fait valoir le patron de HB Technologies. Et de préciser : «L’entreprise compte 90 employés dont 60 ingénieurs, tous algériens. Nous faisons la recherche développement, et la technologie que nous proposons à nos clients est développée à notre niveau, elle est 100 % algérienne».
«Carte bon marché mais pas du tout pratique»
Abdelhamid Benyoucef a gros sur le cœur. «Pour le service de l’état civil, nous avons soumissionné en proposant un logiciel en Open. C’est-à-dire que nous leur vendons le produit, nous leur apprenons comment l’utiliser et nous n’intervenons plus par la suite. Et personne, à part les gens du ministère de l’Intérieur, n’accèdera à la base de données. C’est qu’en plus de ses qualités pratiques, il est hautement sécurisé. Or, le ministère de l’Intérieur a opté pour une boîte fermée proposée par les Français qui interviennent à chaque fois qu’il y a problème. Euxmêmes (les Français, ndlr) ne maîtrisent pas cette technologie et leurs solutions n’offrent aucune garantie de sécurité. La preuve, et toute les chaînes d’information en parlent ces jours-ci, un million de passeports biométriques falsifiés est en circulation en France. J’ai adressé même une correspondance au ministre de l’Intérieur de l’époque pour lui dire que le système acquis est vulnérable, en vain. Et le passeport biométrique a pris du retard parce que les Français ne maîtrisent pas la technologie», assène-t-il. Dit autrement, le ministère de l’Intérieur a opté pour une solution qui, il est vrai, ne lui a pas coûté chère, mais a mis la base de données entre les mains des Français. Des données qu’on peut, plutôt, monnayer ailleurs… Idem pour la carte Chifa. L’Etat a choisi le leader mondial Gemalto (américain) qui maîtrise la technologie mais qui nous a fourni une «carte bon marché et pas du tout pratique». C’est que la base des données contient plus d’informations que peut offrir n’importe quelle étude du marché du médicament en Algérie, la plus efficace qui soit… Bref, le ministre de l’Intérieur, qui a reçu son homologue nigérien lundi à Djenane El Mithak, dans le cadre de cette même visite effectuée dans le cadre de la coopération entre l’Algérie et son voisin du Sud, ne lui a même pas proposé la technologie algérienne. Lui, qui est venu à la recherche d’une «carte d’identité sécurisée pour ses concitoyens ». «Lorsque nous avons soumissionné chez les Français pour le marché de la carte santé Vital II, ils nous ont signifié par écrit que le marché est réservé aux seuls Français», se rappelle, non sans amertume, M. Benyoucef. Et de conclure : «Nous avons développé bien d’autres produits, une carte de santé, une carte d’identité, un passeport biométrique et même un permis à points que nous pouvons mettre en circulation dans six mois.»
Source : Quotidien Le Soir d'Algérie du 22/12/2011
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